Emmanuel Chaume n’a véritablement connu et expérimenté le pays qui lui vaut sa nationalité (la France) qu’à 20 ans. Non sans mal, les mutations successives de son père, directeur de centres culturels français à l’étranger, en ayant fait un enfant puis un adolescent apatride.
Fils de parents intrépides, il a, dès son plus jeune âge, été confronté à un apprentissage de la vie exceptionnel et souvent périlleux. Quand le statut privilégié de sa famille aurait pu le mettre à l’abri, les choix de ses parents l’exposaient au danger. Et quand ce même statut les fragilisait, lui et les siens, en raison de la situation politique des pays dans lesquels ils étaient installés, le goût de l’aventure l’emportait toujours, jusqu’aux limites du raisonnable parfois.
Plus tard, l’adolescence a apporté son propre chaos, ses propres nébulosités à celles qu’ils connaissaient déjà. Elle a fait apparaître des sentiments qu’Emmanuel aurait voulu continuer d’ignorer : l’incertitude sur ce que peut ou doit devenir un garçon au « pedigree » familial aussi lourd (une grand-mère écrivain, un grand-père peintre et poète, une mère peintre et un père à l’érudition sans borne) ; l’ambiguïté liée à son statut ultra-marin encombrant, lui le blanc à la peau blanche qui, pendant vingt ans, s’est tour à tour vu avec les yeux bridés et la peau noire. Comment intégrer une minuscule chambre d’une Cité U grise et « typiquement » française (donc étrangère) sans se sentir abandonné ? Que faire de ces liens familiaux qui n’ont cessé de se distendre et qu’il paraît impossible de resserrer jamais ?
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